TROYES
Publié par Nicolas JONQUET, notaire à Troyes
Immobilier des particuliers, Famille L'office dans la presse
Lorsque des époux sont mariés sous le régime de la séparation de biens, il est fréquent que leur contrat de mariage contienne une clause usuelle suivant laquelle les époux sont réputés s’acquitter au jour le jour des charges du mariage dans la proportion de leurs facultés respectives
Au jour de la dissolution de leur régime matrimonial, c’est-à-dire lors d’un divorce ou lors du décès d’un époux, les mariés acceptent alors l’idée générale qu’il n’y aura pas de comptes à faire entre eux concernant ces charges courantes.
Lorsqu’il s’agit de dépenses du quotidien liées à l’entretien du ménage, d’aménagement du logement familial ou d’éducation des enfants, il sera toujours fait échec à une demande en remboursement par celui s’estimant avoir été lésé (sauf dépenses manifestement excessives).
Mais lorsque les époux font l’acquisition d’un bien immobilier en indivision et qu’un seul a remboursé le prêt, c’est au moment de la désunion que surgissent les revendications et la réponse à apporter est plus nuancée. Si la générosité de l’un au profit de l’autre fait toujours bonne figure, cette largesse trouve rapidement ses limites lors d’une séparation.
L’un prônera la simple exécution de la contribution aux charges du mariage, voire exceptionnellement la donation « rémunératoire », alors que l’autre considérera qu’il s’agissait d’un « prêt » (ou créance entre époux).
Une clause « standard » peut être sujette à la libre interprétation des époux selon une notion d’équité bien personnelle et les tribunaux sont régulièrement saisis de ce contentieux. Les juges du fond ont le dernier mot pour décider si cette présomption de contribution peut être renversée et les récentes décisions rendues vont dans le sens d’une présomption irréfragable. La jurisprudence retient également une conception large de la notion de charges du mariage pour y inclure l’acquisition de la résidence principale mais également les dépenses d’agrément (comme l’achat d’une résidence secondaire).
A l’aune de ces décisions, certains couples à la conception séparatiste plus marquée ne s’en satisferont pas.
La jurisprudence évoluant, la contractualisation « sur mesure » de son régime matrimonial reste un moyen sûr pour désamorcer l’éventuel futur litige.
Rien n’empêche de préciser les modalités et l’étendue de cette contribution aux charges dans son contrat de mariage. S’il est impossible de prévoir une exonération totale, il est envisageable de concevoir cette présomption uniquement sur la résidence principale, à l’exclusion de tout autre investissement immobilier (secondaire ou locatif). Ce dernier donnerait alors lieu à un rééquilibrage conformément à la réalité du financement de chacun. D’autres couples pourront préférer une présomption simple, clairement indiquée dans le contrat, qui permettra plus de liberté dans les comptes à faire mais pourra être source d’insécurité.
Votre notaire pourra ainsi proposer des clauses emportant des effets différents le moment venu et ne manquera pas d’évoquer avec vous la question importante du financement lors de l’acquisition.
Nicolas JONQUET
Notaire à Troyes, Office Jonquet-Chaton
Article paru dans Les Echos le 23 mars 2018
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